Des vivants et des morts

Mercredi, mon amie me parle d’une pièce « Tant bien que mal » qui va se jouer mercredi 21 mai. Je ne dois la manquer en aucun cas me précise-t-elle. Elle l’a vue. Elle a été bouleversée : « J’ai chialé tout du long, ça va te plaire ». Présenté ainsi, ça n’envoie pas du rêve, et pourtant. Il s’agit de la compagnie MMM invitée par l’association Le Ressort à Joyeuse. Tout ceci m’est fort inconnu. Mais ce mercredi, je ne serai pas là… J’aurai tellement aimé…

Jeudi, et c’est tellement vrai, une certaine Julie me contacte pour couvrir un événement : Julie de l’association Le Ressort me dit- elle ! Elle m’évoque ce dimanche à venir avec des espaces créés pour que tout un chacun puisse déposer un peu de lui, décharger, témoigner, pleurer, expliquer, raconter, écrire, au sujet de l’indicible, du départ sans retour possible. Mais pas que… c’est ok pour moi, je serai là.

C’est ainsi que dimanche, je me rends sur le lieu de prise de vue, sur la place du marché à Lablachère, en sud Ardèche. En retard, j’envoie à la hâte un message au sujet de la mort justement. A quelqu’un qui compte. Et puis j’arrive en lieu et place, au cœur du sujet. Je rencontre Julie. Et l’équipe. C’est ici que je vais témoigner de ce que j’observe… Et poser également mes valises, écrire quelque chose…

Ce sujet qui dérange, qui brasse, ce propos que l’on peine à aborder, ces départs que l’on refuse, que l’on accompagne, que l’on remercie, ces départs qui nous tuent, nous laissent comme une coquille vide, désincarnée. Ou nous libèrent aussi. Ces gens qui ont croisé nos vies… Que l’on ne reverra plus jamais avec certitude.

Et puis il est aussi question de ces deuils que l’on​ ne sait pas faire, ces deuils que nous ne parvenons pas à terminer car il s’agit du deuil d’un vivant. C’est ici que Julie et moi nous regardons avec force. Nous cherchons la légitimité et nous ​accordons : le deuil, c’est aussi avec les vivants. C’est ici que nous nous sommes alors rencontrées. « L’impossibilité de faire le deuil d’un vivant, c’est qu’il reste toujours un espoir en soi ». C’est presque pire.

Les gens jouent le jeu de déposer un peu de tout cela sur une carte postale qu’ils déposent dans cette boite à ciel ouvert, chez « La gardienne » qui vous accueille, une caravanne, enregistre votre témoignage et vous écoute… Ou encore « La confidente » : un peu à la manière d’un confessionnal, une bénévole vous écoute, via un téléphone, dans une armoire probablement normande… Enfin la levée d’un cercueil et des déambulations facilitent la rencontre des passants, invite, propose. Mais également explique… La mort dérange toujours. En outre, c’est bien ici que nous sommes tous égaux.

Après leur premier projet « Histoire de familles », l’association Le Ressort revient avec « Des morts et des vivants », une envie de créer, discuter, collecter autour de la mort, nos mots, les deuils, ce tabou qui fait partie de notre vie. Tout est ici – Pour suivre les prochains rendez-vous www.assoleressort.fr